Les meilleurs cavaliers du monde offrent un spectacle magnifique à Rio 2016
La France, la Grande-Bretagne et l’Allemagne ont été les grands protagonistes des superbes épreuves d’équitation des Jeux de Rio 2016 à Deodoro. En dressage, l’Allemande Isabell Werth a remporté ses 9e et 10e médailles, devenant la cavalière la plus récompensée aux Jeux Olympiques, hommes et femmes confondus.
Astier Nicolas, Karim Laghouag, Thibaut Valette et Mathieu Lemoine ont remporté le concours complet d’équitation, le 9 août à Deodoro, devant l’Allemagne et l’Australie. Ils ont offert à la France son premier titre olympique à Rio 2016, avec un total de 169 points à l'issue du concours de saut d’obstacles (CSO), détrônant l'Allemagne (172,80), alors que l'Australie a terminé avec un score de 175,30. C'est le deuxième sacre pour les Français dans la discipline, après celui de 2004 à Athènes. Aux Jeux de Rome en 1960, les « Vestes bleues » avaient conquis la médaille de bronze.
Les quatre couples tricolores, Nicolas et Piaf de B’Neville, Laghouag et Entebbe, Vallette et Qing du Briot, Mathieu Lemoine et Bart L débutaient aux Jeux. Sans-faute en saut par équipes, Astier Nicolas s’est idéalement placé pour une médaille individuelle, à seulement 1,1 point du leader, l'Allemand Michael Jung, double champion olympique à Londres.
« J'espérais qu'on décroche la médaille d'or, je sais que c'était très ambitieux. On s'est donné les moyens pour que ça passe, tout le monde a été génial dans notre équipe, a dit Astier Nicolas. On a aussi bénéficié de la méforme des autres, ça veut dire qu'on était plus en forme, donc les meilleurs. C'est vrai qu'il y avait un peu de stress, je rentre pile dans le temps en saut d’obstacles. Et puis là, on l'a eue du premier coup, on n'a pas fait appel contre les Allemands comme à Athènes. On va repartir directement avec la médaille autour du cou, ça va être fantastique. » En 2004 à Athènes la France avait en effet récupéré l'or sur tapis vert après la disqualification de l'Allemande Bettina Hoy pour un point de règlement.
La France, deuxième après le dressage, longtemps son point faible, est restée sur le podium (3e) à l'issue du cross qui avait fait pas mal de dégâts la veille. Pour le CSO, les Français étaient encore quatre, alors que les autres nations fortes avaient vu leurs rangs réduits à trois équipiers, en raison d'éliminations sur chute.
Si l'Allemagne, avec trois sans-faute en saut, est remontée de la quatrième place à la deuxième, synonyme de médaille d'argent, l'Australie et la Nouvelle-Zélande ont payé cher cette réduction d'effectifs, tous leurs point étant additionnés. Pour l'Australie, Stuart Tinney avait débuté avec 17 points de pénalités. Et, en dernier relayeur, Sir Mark Todd, la légende du complet, double champion olympique (1984 et 1988), a enfoncé la Nouvelle-Zélande, en faisant tomber quatre barres.
L'or d'Athènes avait été la dernière médaille olympique de l'équitation française. Pour la petite histoire, si les complétistes de 2016 ont ouvert le livre d'or de la délégation française à Rio, le cavalier de saut d'obstacles Pierre Jonquères d'Oriola, en selle sur Lutteur B, l'avait refermé le dernier jour aux Jeux de Tokyo, en 1964, offrant in extremis sa seule médaille d'or à la France.
Michael Jung conserve son titre
Dans la foulée du verdict par équipes, Michael Jung a remporté son deuxième titre individuel consécutif du concours complet en terminant avec deux parcours de saut sans faute, pour devancer avec 40,90 pts le Français Astier Nicolas (48), qui a fait tomber une barre dans son dernier parcours, et l'Américain Phillip Dutton (51,80). Ainsi, à l’issue des trois journées de compétition et des deux parcours de saut d’obstacles finaux, Astier Nicolas a remporté une médaille d’or et une en argent, tandis que Michael Jung s’en est adjugé une en argent et une en or!
Jung rejoint les deux seuls cavaliers de l'histoire des Jeux à avoir réalisé le doublé individuel : le Néerlandais Charles Pahud de Mortanges (Amsterdam 1928 et Los Angeles 1932) et le Néo-Zélandais Mark Todd (Los Angeles 1984 et Séoul 1988), septième à Rio.
Jung, 34 ans, montait le même partenaire qu'à Londres 2012, Sam (16 ans désormais), avec lequel il avait également triomphé par équipes, après que le jeune Takinou (9 ans) avait été mis hors course trois semaines avant les Jeux de Rio par une fièvre infectieuse. Le cavalier du Bade-Wurtemberg a raté de peu le double double, la Mannschaft se classant deuxième par équipes derrière la France.
« Réaliser cela deux fois avec le même cheval est vraiment très spécial », a remarqué Michael Jung. « C’est incroyable. C’est un sentiment merveilleux quand on se lance dans le parcours et que le cheval saute avec tellement de puissance. A Londres, j’ai ressenti la même chose. Sam est tout simplement fantastique. C’est un cheval brillant ». Michael Jung et sa monture, dernier couple à se lancer, ont réussi un magnifique sans-faute, avalant les obstacles avec une fluidité exceptionnelle. « Il faut savoir se contrôler et ne pas faire en sorte que le cheval ressente la pression. Et puis il ne reste plus qu’à faire son truc ! »
12e avec les Etats-Unis, Phillip Dutton était 4e en individuel avant l’explication finale. L’Australien Chris Burton, placé devant lui, ayant fait tomber deux barres tandis qu’il ne prenait que 4 points de pénalité, Dutton a réussi à accrocher le bronze. « D’abord, j’étais déçu à cause de mon erreur, mais je suis reparti de l’avant. C’est irréel. C’est le vrai test des cavaliers. C’est le nec plus ultra des sports équestres. »
Isabell Werth au sommet de l’équitation, l’Allemagne au sommet du dressage!
Reine déchue du dressage, l'équipe d'Allemagne a magistralement repris sa couronne olympique le 12 août, en devançant la championne en titre, la Grande-Bretagne de Charlotte Dujardin. Les voilà réhabilités: après avoir régné sans discontinuer entre 1984 et 2008 sur le dressage par équipes aux Jeux, les cavaliers allemands avaient dû se contenter de l'argent à Londres en 2012, victimes collatérales d'un jour de grâce de Charlotte Dujardin. Un affront lavé grâce à une démonstration de force de Kristina Broring-Sprehe, Isabelle Werth, Dorothee Schneider et Sonke Rothenberger, qui ont réalisé un score moyen de 81,936 %, avec trois reprises au-delà de 80 %. Très loin devant les Britanniques (78,602 %).
« Pour être honnête, on savait que l'on était capable de décrocher l'or, car je ne me rappelle pas avoir vu une équipe d'Allemagne comme la nôtre, avec quatre chevaux capables de faire 80 % », a estimé Werth. « Je suis vraiment fière de l'équipe, c'est un beau travail collectif, a-t-elle poursuivi. Ça nous a donné beaucoup de confiance. C'est un grand jour. » Isabell Werth a du coup remporté sa neuvième médaille olympique et son cinquième titre par équipes depuis 1992!
Charlotte Dujardin, auteur de la meilleure reprise du Grand Prix le 11 août, a livré le lendemain une excellente prestation (83,025 %), mais en-deçà de ses attentes et surtout insuffisante pour se parer d'or avec son emblématique hongre Valegro. « Il n'a fait qu'une sortie cette année et j'aurais dû surement m'entraîner un peu plus, a-t-elle admis. Il n'y a eu que de toutes petites incompréhensions entre nous. Je m'en veux, car il était vraiment en très grande forme. »
Les États-Unis ont pour leur part grimpé sur la troisième marche du podium, au détriment des Néerlandais qui avaient décroché le bronze à Londres. Ces derniers étaient toutefois privés de la cavalière Adelinde Cornelissen, un de leurs atouts maîtres, dont le cheval Perzival est tombé malade à Rio.
Charlotte Dujardin conserve brillamment son titre du dressage
Trois jours après l’épreuve par équipes, Charlotte Dujardin a brillamment conservé son titre olympique du dressage individuel en établissant au passage un nouveau record dans la compétition grâce à une reprise libre créditée de 93,857 %. En prenant la médaille d’argent, l’Allemande Isabell Werth a remporté sa 10e médaille olympique, record de podiums en équitation!
Dujardin, âgée de 31 ans, a ainsi doublé la mise après avoir illuminé l'épreuve de Londres en 2012, en hissant la barre à 90,089 % à l’époque. Elle offre aussi une retraite en or à son hongre de 14 ans Valegro, auteur d'un dernier récital magistral, proche du record du monde établi par le duo en 2014 (94,30 %). Il s'agit de la quatrième médaille olympique pour Dujardin et Valegro, déjà récompensés de deux médailles d'or en individuel et par équipes à Londres 2012, et d'une en argent par équipes à Rio 2016.
Très loin derrière Dujardin, qui a fini sa reprise très émue, l'Allemande Isabell Werth (89,071 %) a ajouté l'argent à une collection bien garnie. La cavalière âgée de 47 ans est désormais la plus récompensée de l'histoire des Jeux Olympiques avec six médailles d'or et quatre autres d'argent réparties sur cinq participations, ce qui lui permet de devancer la Néerlandaise Anky Van Grunsven.« J’adore les chevaux, et j’adore m’entraîner. Gagner des médailles avec trois chevaux différents ça vaut plus que tout ! » Werth avait constitué le couple le plus récompensé de l’histoire du dressage avec Gigolo, de 1992 à 2000. Elle montait Satchmo à Beijing 2008, avant de venir à Rio avec Weihegold OLD. Sa compatriote allemande Kristina Broring-Sprehe (87,142 %) a grimpé, elle, sur la troisième marche du podium, remportant une deuxième médaille à Rio comme les cavalières qu’elle a accompagnées sur le podium.
Charlotte Dujardin n’était pas sûre que sa reprise libre allait lui assurer la victoire : « Si je n’avais pas gagné, je savais en tout cas que je n’aurais pas pu faire mieux. Valero ne pouvait absolument pas en faire plus. ». Mais elle a conservé son titre, et de manière très brillante. « C’est absolument incroyable, Je ne peux pas y croire. Je suis submergée de bonheur, » a-t-elle dit, avant d’ajouter à propos de sa reprise libre sur des airs de samba : « C’est une nouvelle reprise. Nous la faisions juste pour la deuxième fois. C’était tout simplement magique. J’ai ressenti une grande émotion dans la dernière ligne centrale. Valegro se donne toujours pour m’apporter le meilleur. J’ai vraiment senti que tout se faisait sans efforts. »
Isabell Werth devient donc la plus récompensée des cavaliers et cavalières olympiques, toutes disciplines confondues, avec un total de dix médailles. « Je n’ai pas pensé au moindre record. Seulement à bien monter aujourd’hui. Ça a été dur de passer la dernière. Je savais que Charlotte avait fait 93 %, mais ma jument Weihegold OLD allait super bien malgré la chaleur. En tout cas, mes médailles sont bienvenues pour le dressage allemand. Nous avons traversé des temps difficiles dernièrement, alors j’espère que ça va nous donner un coup de pouce, pour l’équitation et pour le sport. Nous en avons besoin. » Isabelle Werth compte-elle disputer ses sixièmes Jeux à Tokyo en 2020 ? « Qui sait ? On va travailler pour ça. »
Les cavaliers français en or en saut d’obstacles, 40 ans après !
Le 17 août, l’équipe de France de saut d'obstacles a remporté la médaille d'or par équipes des Jeux Rio 2016. L’argent est revenu aux États-Unis. Le bronze est allé à l'Allemagne du No 1 mondial Christian Ahlmann, après un barrage contre le Canada. Il s’agit du premier titre des cavaliers français dans la discipline depuis les Jeux de Montréal en 1976.
Pour le saut d'obstacles, il s'agit de la première médaille française depuis 20 ans et le bronze d'Alexandra Ledermann à Atlanta en 1996. Les « Vestes bleues » font ainsi oublier leur fiasco de Londres 2012 avec zéro médaille, particulièrement en saut d'obstacles, où les Français ne s'étaient même pas qualifiés pour la finale du concours par équipes.
Après un bon premier tour le 16 août (1 seul point de pénalité), grâce notamment à une Pénélope Leprévost parfaite, les Français ne pointaient qu’en 5e position, l'Allemagne, le Brésil, les États-Unis et les Pays-Bas ayant réussi un sans-faute. Le lendemain, Philippe Rozier, dont le père Marcel avait été sacré à Montréal, a réalisé une superbe ouverture. Le remplaçant de Simon Delestre, le No 2 mondial forfait après la blessure de son cheval, a seulement été pénalisé sur le temps (1 point). Puis Kevin Staut a réalisé l'un des seuls sans-faute complets sur ce long parcours, sans même de pénalité de temps.
La pression était alors sur les Américains, les seuls à n'avoir pas encore craqué. Mais Lucy Davis faisait tomber une barre (4 points), et en raison de l'abandon de la dernière cavalière Elizabeth Madden, les Américains ne disposaient plus de chance de se rattraper.
Le cavalier suivant, Roger-Yves Bost, tirait le meilleur de sa Sydney Une Prince, en prenant un tout petit peu de temps (1 pt) pour un total de 3 points qui permettait aux Français de finir devant les Américains (5 pts), champions olympiques à Athènes 2004 puis à Beijing 2008. Devancés, les Allemands ont dû se remettre en selle pour disputer un barrage pour le bronze face aux Canadiens dont ils sont sortis vainqueurs. Ainsi, les Français ont été sacrés après le passage de leurs trois premiers cavaliers, ce qui fait que Pénélope Leprévost n’a même pas eu besoin de monter une nouvelle fois Flora de Mariposa pour conclure.
Ce triomphe des « Vestes bleues » a peut-être trouvé son origine dans la personnalité, l'enthousiasme et l'expérience du remplaçant de Simon Delestre, Philippe Rozier. « La médaille est dans le salon chez mon père, maintenant j'ai la mienne ! C'est un vieux rêve d'enfant. C'est arrivé! Mon père m'a dit que c'était le plus beau cadeau que l'on pouvait lui faire... quarante ans après. »
« On y a cru jusqu'au bout, a jubilé Roger-Yves Bost. Les chevaux, c'est jamais fini. On ne pensait jamais avoir l'or. A priori, il y en avait quatre, cinq meilleurs que nous, on n'était pas favoris. »
Une chevauchée en or pour Nick Skelton en saut d’obstacles individuel
Les épreuves d’équitation des Jeux de Rio 2016 se sont achevées le 19 aout, avec les deux derniers passages, plus un barrage pour le podium mettant aux prises six cavaliers dans le parcours de saut d’obstacles qui ont vu le triomphe du Britannique Nick Skelton. Le champion olympique par équipes 2012 à Londres, 58 ans, a devancé au temps au terme de ce barrage, le Suédois Peder Fredricson (43 sec 35). Le Canadien Eric Lamaze, champion olympique 2008, qui a fait tomber une barre, a pris la médaille de bronze.
Après la finale Aet le premier passage où treize cavaliers se sont partagés la première place en réalisant le sans-faute sans pénalité de temps, le tracé a été comme attendu nettement relevé pour la finale B. Bien plus rapide, ce parcours a fait des dégâts au classement. Skelton a longtemps mené la troupe avec son double zéro en début de programme. Le cavalier des Midlands a ensuite été rejoint par un autre champion olympique de Londres, mais lui en individuel, le Suisse Steve Guerdat. Puis par le Qatari Ali Al Thani et l'Américain Kent Farrington, médaillé d'argent par équipes à Rio, le Suédois Peder Fredricson et le Canadien Eric Lamaze, champion olympique en 2008.
Ces six cavaliers ont donc disputé un barrage, dont seul l'expérimenté Britannique et le Suédois sont sortis sans faute. Mais Skelton a été plus rapide, 42 sec 82 contre 43 sec 35 à Fredricson qui remporte ainsi une deuxième médaille d'argent olympique, après celle d'Athènes 2004 dans le concours par équipes.
Savourant son moment de gloire après avoir gagné seulement la deuxième médaille de sa longue carrière, Nick Skelton a expliqué « J’ai attendu longtemps. J’ai senti que mon cheval Big Star n’avait pas eu la chance qu’il méritait, comme aux Jeux de Londres où nous avions manqué une médaille en individuel. Je suis vraiment satisfait de ce cheval. Il a remporté sa dernière compétition majeure au Grand Prix d’Aix-la-Chapelle en 2013. Il y a eu pas mal de problèmes et le chemin du retour a été long. »
« C’était difficile de passer en premier, et je savais que je devais assurer un bon temps pour mettre la pression sur les autres. Peder Fredricson était rapide, mais pas assez », a ajouté le cavalier britannique en or qui explique le secret de son succès : « Il faut juste continuer, tant que tu as un bon cheval, tu as tout bon. ».
« Mon cheval a bien sauté, a déclaré le cavalier suédois Peder Fredricsson. Il n’a pas fait tomber une seule barre sur toute la compétition. J’espérais une médaille et je m’en suis tenu à mon plan. C’était une semaine formidable. »
« C’est incroyable », a dit Eric Lamaze, ému après avoir gagné le bronze venu s’ajouter à l’or olympique qu’il avait obtenu à Beijing en 2008 « Cela a demandé beaucoup de travail. D’abord lors du barrage pour la médaille par équipes qu’on a perdu, et après quand j’ai mené jusqu’à la fin. Le deuxième tour a été énorme. »